Pompage-écrémage

Mis à jour : 13/03/2023
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Principe

En présence de surnageant, les eaux souterraines sont pompées, ce qui génère un cône de rabattement. Les produits en phase pure s’accumulent gravitairement au centre de ce cône facilitant ainsi leur récupération en surface.

Caractéristiques
Mise en œuvre : In situ
Nature : Méthode physique par évacuation de la pollution
Matrices : 
  • Sol
  • Eau souterraine
Domaines d'application : 
  • ZS
Terme anglais : skimming
Codification/norme : C311e
Polluants traités : 
  • TPH lourd
  • TPH léger
  • SCOV
  • COV
Description

Le pompage des eaux souterraines produit un cône de rabattement ; le surnageant (produit pur de densité inférieure à 1) suit le gradient hydraulique, migre gravitairement vers le(s) point(s) bas où il s’accumule. Cette accumulation permet de récupérer plus rapidement le surnageant.

Le surnageant est alors pompé à l’aide d’écrémeurs vers les unités de stockage en surface (citerne) avant d’être éliminé (incinération, récupération des hydrocarbures …). Les écrémeurs sont positionnés au niveau du surnageant et permettent de récupérer spécifiquement les hydrocarbures en évitant au maximum de récupérer les eaux souterraines. Les systèmes les plus couramment utilisés sont les hydroéjecteurs pneumatiques, les skimmers (ou crépines flottantes) et les bandes oléophiles.

Figure 1 - Schéma de principe du pompage-écrémage.

Figure 1 - Schéma de principe du pompage-écrémage.

Les pompes de rabattement sont positionnées sous l’interface surnageant/eau. Dépendamment de la position de ces pompes, les eaux seront plus ou moins chargées en hydrocarbures ; positionnées plusieurs mètres sous cette interface, elles contiendront peu de produits dissous. En cas de variations importantes du niveau du toit de la nappe, les débits des pompes de rabattement pourront être asservis à un niveau d’eau (détecteurs de niveau bas et de niveau haut). Par contre, si elles sont positionnées plus haut elles contiendront plus d’hydrocarbures.

Le suivi du volume de flottant récupéré est primordial. Au bout d’un certain temps, on observe une stagnation de la récupération des hydrocarbures. Pour des épaisseurs de surnageant inférieures à 1 cm, le pompage sélectif des hydrocarbures est pratiquement impossible. A ce stade, les pompages de rabattement sont mis en fonctionnement par intermittence, ce qui permet de faire varier le toit de la nappe (remontée et descente) et de remobiliser partiellement les hydrocarbures.

Généralement, lorsque cela est possible, les pompes sont dans un premier temps positionnées nettement en dessous du surnageant pendant la phase de récupération du flottant. Une fois que le pompage sélectif des hydrocarbures est impossible, les pompes sont relevées afin de traiter autant que faire se peut les eaux souterraines et le reliquat de surnageant.

Les rejets des eaux souterraines générés par le pompage doivent faire, dépendamment des concentrations et des autorisations de rejet, l’objet d’un traitement adapté (déshuileur, stripping, charbon actif…).

Moyens

Les moyens matériels nécessaires au Pompage-écrémage sont les suivants :

  • matériel d’injection et d’extraction (si nécessaire) : puits verticaux de rabattement, puits horizontaux, pompes (immergées, de surface..), tuyauterie, tranchées, galeries d’infiltration, compteur...,
  • matériel d’écrémage : skimmers (ou crépines flottantes), hydroéjecteurs pneumatiques, bandes oléophiles...,
  • un système de traitement des eaux usées on site pour la phase dissoute si nécessaire : charbon actif, stripping, déshuileur, oxydation catalytique, réduction, flottation, floculation, membranes, résines, précipitation, évaporation, décantation,
  • un stockage des déchets solides et liquides issus du traitement notamment une citerne de récupération du surnageant,
  • un système piézométrique permettant de suivre les écoulements et la qualité des eaux souterraines mais aussi les épaisseurs de surnageant.
Paramètres de suivi

Les paramètres à suivre lors d’une opération de Pompage-écrémage sont les suivants :

  • la piézométrie,
  • l’épaisseur de surnageant,
  • le suivi de la masse de surnageant récupéré (par relevé volumétrique) dans les citernes de stockage,
  • la qualité des eaux souterraines en amont, en aval et au droit de la source de pollution :
    • la présence de surnageant,
    • les paramètres pH, O2, température, conductivité,
    • les concentrations en polluants,
    • les concentrations en métabolites éventuels.
  • les concentrations en polluants dans les rejets aqueux pour la phase dissoute (respect des normes de rejets),
  • les paramètres relatifs au traitement des eaux pour la phase dissoute (ex. : bilan de matière, séparation …),
  • la caractérisation des effets « rebonds ».
Variantes

Les variantes du Pompage-écrémage sont :

  • le Confinement hydraulique : le pompage - écrémage peut être utilisé comme une solution temporaire de confinement afin de stopper l’extension du surnageant,
     
  • la tranchée drainante : positionnée perpendiculairement au sens d’écoulement de la nappe et sur toute la longueur de la source de pollution (ou du panache de pollution), la tranchée drainante permet par différence de perméabilité de piéger temporairement le surnageant. Les écrémeurs positionnés à l’intérieur de ces tranchées permettent de récupérer le surnageant. Afin de faciliter la récupération de la phase libre, des géomembranes sont souvent positionnées en aval immédiat du massif filtrant. On se rapproche alors d’un pseudo-confinement,
     
  • l’Extraction double phase (dual phase extraction) : une dépression importante est appliquée dans la zone non saturée et au niveau de la partie supérieure de la zone saturée, ce qui a pour but d’extraire les gaz des sols, le surnageant (cas des produits flottants) et la phase dissoute. Dans ce cas, le système de traitement en aval des puits d’extraction doit tenir compte de la séparation et du traitement des liquides (phase dissoute et surnageant) et des gaz. Cette technique ne peut être employée que dans le cas d’une nappe peu profonde.
Applicabilité

Cette technique s’applique sur des hydrocarbures de densité inférieure à 1 en phase libre (gasoil, fuel, essence, supercarburant, solvants ….).

Par ailleurs, cette technique s’applique principalement dans des aquifères relativement perméables (sablo-limoneux à graveleux) et homogènes.

Faisabilité et dimensionnement

1. Faisabilité

La faisabilité d’un traitement est évaluée à l’aide d'essais :

  • d’orientation qui visent à valider la possibilité de mettre en œuvre une technique de dépollution ;
  • d’évaluation des performances qui servent à vérifier l’atteinte des objectifs et permettent d'estimer la vitesse du traitement donc sa durée.

Le guide méthodologique « Traitabilité des sols pollués » de l’ADEME (2009) et le Guide ESTRAPOL (2019) vous donneront des éléments vous permettant de vérifier la faisabilité de la technique sur votre site.

2. Dimensionnement

Le dimensionnement relève d’un travail d’ingénierie en aval des essais de faisabilité.

Tout comme pour le Pompage et traitement, les caractéristiques de la source de pollution et le contexte géologique/hydrogéologique vont permettre de définir :

  • le rayon d’action des points d’extraction en fonction des cônes de rabattement,
  • le nombre, l'espacement et les caractéristiques des points d’extraction (profondeur, diamètre, puits, tranchées pour les profils géologiques stratifiés ou très peu perméables..),
  • le type et la puissance des pompes,
  • le type et la puissance des écrémeurs (hydroéjecteurs pneumatiques, skimmers, bandes oléophiles),
  • les dimensions de l’unité de traitement (phase dissoute) si nécessaire,
  • en cas de réinjection dans la nappe : le nombre, l'espacement et les caractéristiques des points d’injection (profondeur, diamètre, tranchées, puits..).

L’Union des Professionnels de la Dépollution des Sites (UPDS) a déterminé les paramètres à fournir pour permettre le dimensionnement des traitements :

a. Définition du projet

  • Délais,
  • Objectifs de traitement (sols et/ou eaux et/ou gaz du sol),
  • Seuils de dépollution ou profondeur/volume d'excavation,
  • Seuils de rejet.

b. Site

  • Accessibilité : au site, au chantier, à la zone de travail,
  • Obstacles aériens et de surface (y compris encombrants),
  • Obstacles souterrains (réseaux enterrés, fondations, blocs ...),
  • Présence d'ouvrages avoisinants, bâtiment, ...,
  • Contraintes liées à l'environnement, aux riverains,
  • Site en activité, coactivité,
  • Durée de mise à disposition des terrains,
  • Contraintes H&S et réglementaires liées au site,
  • Topographie de surface,
  • Surface disponible pour unité,
  • Utilités et distance par rapport à la zone de traitement (eau, électricité - pour électricité : puissance),
  • Gardiennage (prévu ? ou à prévoir ?),
  • Ouvrages existants pouvant être réutilisés (coupe technique de l'ouvrage ou, à défaut : diamètre, profondeur et équipement).

Pour les traitements d'eau :

  • Emplacement du point de rejet.

c. Sol ou matériau à traiter

  • Géologie /lithologie ou nature des sols,
  • Hétérogénéité,
  • Taux de matière organique,
  • Humidité,
  • Température des sols,
  • Perméabilité.

d. Polluants

  • Type (nature),
  • Concentrations (cartographies de pollution dans les sols, l'eau, les gaz du sol),
  • Présence de produit pur (flottant, coulant, piégé…),
  • Estimation du stock,
  • Densité,
  • Épaisseur,
  • Viscosité,
  • Solubilité,
  • Coefficient de partition eau/sols, localisation, concentration,
  • Carte LNAPL,
  • Viscosité,
  • Empreinte chromatographique (GC/FID).

e. Aquifère

Données locales issues d'essai de pompage :

  • Perméabilité,
  • Coefficient d'emmagasinement,
  • Porosité,
  • Gradient,
  • Épaisseur de la nappe,
  • Profondeur,
  • Niveau statique,
  • Épaisseur de la ZNS,
  • Amplitude des variation saisonnières,
  • Anisotropies,
  • Carte piézométrique / direction d'écoulement,
  • Bail down tests (test d'épuisement /réalimentation),
  • Conditions aux limites.

f. Géochimie nappe

  • pH,
  • Conductivité,
  • Potentiel redox,
  • MES,
  • Teneur O2 dissous,
  • Carbonates et hydrogénocarbonates,
  • Sulfates,
  • Fer dissous,
  • Manganèse dissous,
  • H2S dissous.
Facteurs

Le Pompage-écrémage présente les avantages suivants :

  • technique fiable et éprouvée,
  • mise en œuvre relativement simple et rapide,
  • applicabilité à de nombreux polluants (LNAPL en phase pure),
  • il génère peu de perturbation de sols,
  • il est envisageable sous des bâtiments,
  • si les pompes de rabattement sont situées largement sous l’interface eau-surnageant (ou dans le cas de tranchées drainantes), les concentrations en phase dissoute sont alors faibles et le traitement des eaux d’exhaure n’est pas systématique,
  • afin d’améliorer les rendements épuratoires, on peut y associer des procédés chimiques (Lavage),
  • le procédé permet de stopper la migration des polluants en créant des points de fixation de la contamination (confinement hydraulique),
  • la position des piézomètres et des crépines permet de cibler précisément les zones à traiter,
  • les profondeurs de pompage peuvent être de l’ordre de plusieurs dizaines de mètres si nécessaire,
  • la réinfiltration en amont des eaux pompées et traitées permet de limiter les flux vers l’extérieur et de forcer les écoulements au sein du piège hydraulique,
  • le fait d’éliminer la phase flottante permet d’éliminer la source de pollution et de diminuer les émissions associées (phase dissoute et gazeuse).

Ses inconvénients et ses facteurs limitants sont les suivants :

  • le traitement n’est pas possible pour de petites épaisseurs de surnageant (inférieures à 1 cm),
  • le fait de récupérer uniquement le surnageant ne permet pas de traiter la pollution résiduelle adsorbée dans les sols et présente en phase dissoute et gazeuse ; la pollution résiduelle est alors remobilisable (effet rebonds). Ainsi, un traitement complémentaire est parfois nécessaire,
  • dans le cas des aquifères de grandes perméabilités (transmissivité importante), les débits à pomper pour le rabattement sont souvent importants. Il est donc primordial de bien optimiser le nombre et l’emplacement des points d’extraction,
  • son efficacité est limitée dans le cas d’aquifère de faible perméabilité (10-6 m/s), non homogène et/ou fracturé (passages préférentiels à travers les zones les plus perméables à l’eau),
  • sans une maîtrise totale du sens d’écoulement des eaux souterraines, il y a un risque de dissémination de la pollution,
  • une variation importante de la profondeur du toit de la nappe constitue un obstacle important au bon fonctionnement du procédé.
Coûts

En 2009, il est admis que les coûts étaient de l’ordre de 5 à 60 €/m3 pour des puits d’une profondeur inférieure à 15 m (hors traitement complémentaire) (estimations). (BRGM, 2010)

D'après une actualisation des prix fournie par l'UPDS en septembre 2019, la moyenne basse estimée est de 15 €/m3, la moyenne haute de 25 €/m3 et le maximum de 50 €/m3 de liquides pompés/traitées en place (hors consommation électrique).

Pour mémoire, il est toutefois rappelé que ces tarifs ne sont que des estimations tirées du retour d'expérience des acteurs du domaine des Sites et Sols Pollués et pourront varier plus ou moins significativement d'un site à l'autre, notamment en fonction des polluants, des bilans massiques, de la complexité à atteindre la pollution et à intervenir sur le site. S'ils peuvent permettre d'obtenir une fourchette de prix avant la réalisation d'un projet, un budget réaliste ne pourra être obtenu qu'en faisant appel à un professionnel du domaine des Sites et Sols Pollués.

Répartition des coûts :

Le coût total a été réparti selon trois types de charges :

  • Charges exceptionnelles correspondant au coût de la phase initiale (phase pilote, mise en place du chantier : installation d’une unité de traitement, préparation du terrain) et intervenant de façon unique (au démarrage du chantier par exemple),
  • Charges récurrentes correspondant au coût de la phase « chantier » à renouveler au cours du traitement (matériel, main d’œuvre, réactifs ou produits) et pour l'élimination des déchets,
  • Charges liées aux études (hors études de risques sanitaires préalables au chantier) et suivi de la dépollution correspondant aux coûts des analyses et prestations intellectuelles (rédaction de rapports, réunions sur site).

L’investissement initial est important. Il correspond à l’installation de l’unité et du réseau de puits de pompage. Selon la profondeur, la mise en place des puits d’extraction sera plus ou moins coûteuse et selon les débits à traiter, les unités seront différentes. En outre, ces coûts peuvent être réduits par l’utilisation des puits existants.

Le coût de mise en œuvre est peu important. Les charges récurrentes sont liées à la maintenance. Un bon dimensionnement permet de réduire sensiblement ces charges. Par ailleurs, les techniques physiques bénéficient de moindres coûts récurrents.

Le traitement physico-chimique demande un suivi régulier.

Maturité

Le Pompage-écrémage est la technique la plus utilisée pour récupérer le flottant dans les nappes phréatiques perméables dont le toit se situe à de faibles profondeurs.

Etudes de cas :

Efficacité

Les rendements de récupération de la phase flottante sont généralement inférieurs à 50-60 % dans les meilleures conditions.

Délai

Le traitement est assez long et plutôt adapté aux sites en activité. Les délais peuvent varier entre plusieurs mois et plusieurs années.

Taux d'utilisation

En 2012, environ 12,4 % des eaux traitées l'ont été par Pompage-écrémage (quatrième technique la plus utilisée pour dépolluer des eaux souterraines)

(ADEME, 2015)

Références

1. Bibliographie

ADEME (2009)
Traitabilité des sols pollués - Guide méthodologique pour la sélection des techniques et l'évaluation de leurs performances. Guide méthodologique. Version 0 - 15 octobre 2009, 123 p.
https://librairie.ademe.fr/sols-pollues/5686-traitabilite-des-sols-pollues.html

ADEME (2015)
Taux d'utilisation et coûts des différentes techniques et filières de traitement des sols et des eaux souterraines pollués en France (Les)
Étude Ernst & Young
Synthèse des données 2012, 148 p.
https://librairie.ademe.fr/sols-pollues/1738-taux-d-utilisation-et-couts-des-differentes-techniques-et-filieres-de-traitement-des-sols-et-des-eaux-souterraines-pollues-en-france-les.html

BRGM (Juin 2010)
Quelles techniques pour quels traitements - Analyse coûts-bénéfices
S. Colombano, A. Saada, V. Guerin, P. Bataillard, G. Bellenfant, S. Beranger, D. Hube, C. Blanc, C. Zornig et I. Girardeau
Rapport final BRGM/RP-58609-FR
http://ssp-infoterre.brgm.fr/quelles-techniques-quels-traitements
http://infoterre.brgm.fr/rapports/RP-58609-FR.pdf

ESTRAPOL (2019)
Essais de faisabilité de traitement de sols pollués
https://librairie.ademe.fr/sols-pollues/3966-projet-estrapol.html

2. Liens

Technology guide: skimming
2018.
CRC for Contamination Assessment and Remediation of the Environment - Care National Remediation Framework. Version 0.1, 26 pages
https://crccare.com/wp-content/uploads/2022/09/MTechguide_Skimming_Rev0.pdf

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